jeudi 21 janvier 2010

Et pourquoi l'aluine?









Et pourquoi l’aluine ?


Il y a des substances comme ça, qui inspirent plus que d’autres. Nombreux sont ceux qui cherchèrent et trouvèrent inspiration et imagination, oubli et illusion dans d’adjuvants liquides, dans de puissants psychotropes.


Pour certains, c’est (presque) un passage obligé. Chez d’autres, c’est un passe-temps de dandy. Est-ce là le signe d’un dévouement total à la quête imaginative ? Est-ce là le témoignage de la déchéance et de la chute d’un esprit tout juste réduit à de pitoyables expédients ? Libre à vous de juger si l’acte est fascinant ou pathétique…


Il était une fois l’aluine…


Des drogues orientales aux boissons du ponant continental, l’aluine se place parmi ses congénères comme la fée des soirs enchantés. Avec sa rondeur parfumée, avec sa fraîcheur aqueuse et sucrée, avec son protocole précis, précieux, et ses instruments malicieux, elle est la reine de nos imaginaires, la démoniaque amie de nos obsessions nocturnes. A vous délier la langue, à vous affûter la plume, cette verdâtre muse de la création et des aphrodisiaques aspirations n’était pourtant au départ qu’un un simple breuvage médicinal. La vertu a parfois bien des visages.


Sa première distillation apéritive est l’œuvre d’un de nos chers fleurons éthyliques (1). Consommation bourgeoise à ses débuts, sa renommée est telle que les litres coulent et s’écoulent. Et comme offre et demande sont toujours de bons compagnons, les troquets fleurissent, les gosiers se remplissent, la production s’industrialise et l’on distille à foison.


Méfiez-vous des éclatants succès et des modes excessives. Après quelques effets sympathiques, c’est au neurotoxique ami méthanol d’entrer en scène. Vous assommant à grosse dose d’inspiration artistique, de furieuses fulgurances, il s’insinue pour vous ronger l’esprit et vous aliéner l’âme. Et comme il y eut des adeptes, il y eut des victimes, donc des critiques.


Accusée de tous les maux, la pauvre bouteille ne tinte plus tant. On s’écrie même que tout ça rend alcoolique, que ca vous démonte la tête, que c'est le liquide du Malin. Et l'on hurle, on s'insurge, on manifeste sans fin dans les rues en déclamant « Plus d’aluine… mais du vin ! »
Au ban de la législation, en 1915 disparut l’illustre prédatrice, l'amante bifrons et ambiguë.


Une toute petite cuillère


Si sa face obscure se savoure sous le triste nom d’absinthe, elle porte en elle les germes d’un patronyme inspirant. À la fois limpide et lumineuse, aliénante et onirique, notre aluine a le visage ici d’une maudite et artistique amie.
Le Comité de la Cuillère, conscient de son passé sinistre, ne cherche pas ici à redorer son sable et sinople blason, non.
Nous userons d’homéopathiques gouttelettes et de légères cuillerées pour relever le goût de nos billets tricotés de mots, de littérature et de lecture. Tels sont pour nous les ingrédients de la nouvelle aluine, et nous espérons que vous siroterez l'élixir avec plaisir et volupté.

A bientôt, pour une première cuillère.

Le Comité de la Cuillère


(1) c’est en effet le sieur Pernod (fils) qui développa l’activité dans la région de Pontarlier.

(2) Tableau, Degas L’absinthe, 1876

Pour plus d’informations :

http://www.museeabsinthe.com/

http://www.abisinthe.com/histoire_histoire.htm

http://www.heureverte.com/content/view/82/208/

http://fr.wikipedia.org/wiki/Spiritueux_aux_plantes_d%27absinthe


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